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Réflexion sur le bien-être

 

Sans vouloir entrer dans le sophisme, je ressens fortement le besoin de remettre en question le terme ‘bien-être’ servi à toutes les sauces à l’heure actuelle. Il est tellement bien d’être dans le bien-être que ça en est presque devenu une mode, un trophée à acquérir. Et voilà chacun/chacune occupé(e) à courir après, supportant de plus en plus mal la contrainte ou la difficulté qui ‘pollue’ son bien-être, tandis que d’autres vendent tout et n’importe quoi en son nom.

Néanmoins, réfléchissons-y un peu : la vie n’est-elle pas pareille à un chemin d’évolution ? Et que dirions-nous de marcher constamment sur un chemin rectiligne, qui ne varie jamais, où il n’y aurait aucune aspérité, aucune difficulté, aucun changement de paysage ? Autant s’asseoir et rester sur place, non ?

Or, pour celui qui veut cheminer, il/elle doit accepter de se mettre en déséquilibre. Il/elle doit accepter de rencontrer des chemins ardus, autant que des voies plus faciles.

Qu’est-ce que marcher ? Observez vos pieds quand vous entrez en action. Pour faire un pas, vous vous mettez en déséquilibre sur un pied pour faire avancer l’autre plus loin. Rien que le fait de marcher est une succession d’équilibre-déséquilibre.

De même pour l’espace où nous évoluons. Se mettre en mouvement dans l’espace externe signifie comprendre que cet espace évolue et est aussi fluctuant. Parfois, c’est un paysage verdoyant et ensoleillé. Parfois, c’est un désert brûlant. Parfois il pleut et nous sommes dans la boue, ou bien nous avons des rochers à contourner, une montagne à escalader, une forêt sombre ou un marais à traverser. Bien sûr, il nous arrive d’être fatigué et découragé. Nous avons besoin de pauses pour nous ravitailler et prendre des forces. Mais cela est-il une fin en soi ?

Et partant de là, à quoi bon envier ceux qui semblent avoir un chemin plus facile ? Prenons l’exemple du ski. Si vous êtes débutant, prendrez-vous directement la piste rouge ? Non, bien sûr ! En revanche, s’il s’avère que vous êtes un peu plus entraîné, vous contenterez-vous de vous ennuyer sur la piste la plus simple, tandis que vous pourriez dépasser vos limites et éprouver votre maîtrise dans la difficulté croissante ?

Nous avons tous tendance, à un moment ou à un autre, à nous interroger sur notre chemin et ses épreuves, à nous demander pourquoi nous sommes confrontés à telle rude épreuve, à rejeter les raisons sur les autres ou ‘le karma’, la malchance peut-être...

Y-a-t-il vraiment à se demander pourquoi ? Est-ce que nous nous demandons pourquoi un jour il fait beau tandis que l’autre il pleut ? Est-ce que nous nous lamentons et nous demandons pourquoi, lors d’une marche, nous rencontrons à certains moments un terrain mouillé et boueux, ou bien une bonne côte bien intense ? Non bien sûr ! Nous avançons, et sommes finalement contents une fois que nous sommes arrivés en haut, car c’est là que nous avons entraîné nos muscles, notre respiration et nos capacités physiques, n’est-ce pas ?

Si nous glissons ou tombons, nous nous relevons.

Si nous nous sommes trompé de direction, nous en changeons.

Si nous sommes fatigués, nous nous asseyons pour nous reposer.

Et si nous sommes en grande difficulté sur la route, un autre cheminant passe et nous pouvons demander de l’aide. (A ce propos, un thérapeute n’est qu’un cheminant qui affronte ses propres difficultés, aussi avec de l’aide quand le besoin se fait sentir, et qui a juste, peut-être quelques outils et réserves de plus dans son sac à dos).

Nous pouvons choisir quelle question nous poser entre « Pourquoi il m’arrive tout cela ? » ou « Qu’est-ce que je peux apprendre de tout cela ? »

Pour en revenir à la notion du bien-être, oui certes, on peut se dire que l’équilibre et le bien-être absolu existent… dans le non-mouvement.

Mais à partir du moment où vous évoluez dans un monde en mouvance, la seule chose que vous pouvez faire pour marcher avec légèreté, c’est accepter que le chemin ne sera pas forcément de tout repos, et choisir la piste à la hauteur de vos capacités. A certains endroits, ce sera l’hiver et vous aurez faim et froid, à d’autres, vous serez trempés et seuls, et tout cela sera entrecoupé de moments où vous vous sentirez vraiment bien, en paix avec vos pas et ce qui vous entoure. Peut-être même aurez-vous la chance de trouver l’extase à plusieurs reprises sur votre route. Et cela suivra peut-être des chemins où vous serez tombés dans le tréfonds de sables mouvants. Comme dit la ‘’chanson du forçat’’ de Gainsbourg « Qui ne s’est jamais laissé enchaîner ne saura jamais ce qu’est la liberté ». De la même façon, qui ne se confronte pas à des univers parfois hostiles n’apprend pas à connaître ses limites et à se positionner. Evidemment, nous pouvons nous demander si nous avions réellement besoin de cela pour l’apprendre… Tout dépend de ce que nous avons à faire évoluer en nous.

L’acceptation est une notion essentielle dans le cheminement et elle ne signifie pas ‘tout laisser couler’ (ça, c’est le non-mouvement, et il peut aussi avoir ses avantages à certains moments). L’acceptation signifie reconnaître qu’un chemin ne se fait pas sans aspérités et les intégrer pour y éprouver nos facultés, nos forces, découvrir nos faiblesses, nos peurs, nos limites et apprendre à les dépasser.

Seulement ainsi nous pouvons découvrir un certain ‘être bien’, dans cette acceptation, car alors nous arrêtons de ruminer sur nos insatisfactions, nos sentiments d’injustice ou d’impuissance, nos culpabilités (bon, c’est vrai qu’un bon coup de gueule ou de larmes, ça soulage, hein, faut pas déconner quand même! )

Cela est cheminer.

Pour conclure cette réflexion sur le ‘bien-être’, somme toute il n’y a que vous pour savoir où vous devez poser vos pieds. Que cela ne vous empêche pas d’être polis et respectueux des autres cheminants sur la route.

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